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THE RODEO // « THÉRIANTHROPIE PARADIS »

« Thérianthropie ». Ce drôle de mot qui donne au troisième album de The Rodeo une partie de son titre caractérise la transformation d’un être humain en animal, ou l’inverse. Une drôle d’idée pour un drôle d’album, farouche et familier, qui s’organise autour d’un orage.

Mais commençons par le commencement. De The Rodeo, on connaissait la fascination pour l’Amérique de Karen Dalton et des grands espaces sur Music Maelström. On avait suivi sa mue en papillon pop multicolore sur La Musica del diavolo, qui invitait Nick Cave et Arcade Fire au carnaval de Dolly Parton. Trois ans plus tard, c’est une métamorphose beaucoup plus radicale qui attend l’auditeur : Thérianthropie Paradis est entièrement chanté en français. Une langue maternelle sensuelle et imagée qui oriente le songwriting et la voix de Dorothée Hannequin sur de nouvelles pistes, riches de nombreux recoins et demi-teintes. Une densité harmonique qui n’empêche pas l’évidence et la plénitude, bien au contraire. Rarement, dans la France de 2018, aura-t-on entendu autant d’ambition et de maîtrise que sur « Ivre d’amour », extraordinaire morceau d’ouverture qui condense, pour mieux les projeter aux murs, les couleurs de cet album. Quelles couleurs ? Du rouge, évidemment. Carmin, vermillon, pourpre. Sang, vin, lèvres, voitures, fruits d’été.

Conquérant et sûr de son fait, l’album élabore ensuite un quarté en C majeur (« Candélabre », « Calypso », « Cryogénie » et « Cadavre Exquis ») qui juxtapose fébrilement  voracité amoureuse et boulimie mélodique. La pop prédatrice de The Rodeo veut tout, tout de suite: la tête et les jambes, les détails et le mystère, l’Europe et l’Amérique. D’un côté, le sucre de France Gall ou Françoise Hardy; de l’autre le venin d’un Blonde Redhead ou d’un Timber Timbre. Il fallait de la souplesse et de l’ingéniosité pour joindre ces deux rives. Par chance, Dorothée a assemblé autour d’elle un équipe (Jérôme Laperruque à la basse, Antoine Kerninon à la batterie, Mathieu Geghre aux claviers et Laurent Blot à la guitare) capable de tous les acrobaties, de tous les raffinements.

Il fallait aussi un sorcier pour dompter le son cet album qui tourne autour de « L’Orage », organise de fausses accalmies (« Que ma mémoire vive », « Cher Ami »), montre les dents quand on lui parle d’indie et sort les griffes quand on dit « chanson française ». Logiquement, la tâche de mixage a été dévolue à Angy Laperdrix (Aquaserge, Chateau Marmont, Dorian Pimpernel, Of Montreal). Qui mieux que lui en effet pour organiser une thérianthropie ?